Un ryokan à Shiobara
Un ryokan est une auberge traditionnelle japonaise. La première fois que j'ai entendu parler de ce type d'établissement, c'était il y a une quinzaine d'années au moins, dans un livre richement illustré de magnifiques photos, et depuis j'avais toujours rêvé de pouvoir un jour vivre l'expérience de l'hospitalité nippone dans sa forme la plus proche qu'on se fait de l'image du Japon "à l'ancienne". A cette époque, ma vie était très différente de celle d'aujourd'hui et je n'aurais jamais pu deviner que le Soleil Levant deviendrait ma terre d'exil. J'ai donc nourri ce rêve pendant des années sans y croire vraiment. Mais il faut toujours croire à ses rêves, n'est-ce pas ?...
Mon choix s'est porté sur la ville de Shiobara, à trois heures de car au nord de Tôkyô (on peut y accéder en train, mais c'est plus cher et à peine plus rapide). Même si ce n'est que de la petite montagne, en ce début janvier tout était recouvert de neige, et en arrivant on se sent déjà loin de tout. La ville en elle-même ne recèle pas beaucoup d'intérêt. C'est morne, il n'y a aucune animation, et plusieurs cafés et hotels sont abandonnés. Quand les singes, assez nombreux visiblement, descendent de la montagne jusqu'aux abords de la ville, voire jusque dans la ville, ça confère à l'ensemble une atmosphère tout à fait inédite, comparable à rien de ce que je connais. Tout le tourisme à Shiobara repose sur les onsen, c'est-à-dire les stations thermales. Le Japon en regorge. Il s'agit de sources d'eau très chaude, aux vertus réputées curatives, qui jaillissent des entrailles de la terre, et dans lesquelles les Japonais adorent se plonger. A Shiobara, on trouve même une étroite cabane où les passants peuvent se réchauffer les doigts dans de petites cuves emplies d'eau (difficile d'y plonger la main entière, c'est trop chaud). Mais les choses commencent à devenir sérieuses quand on se rend au onsen pour les pieds. Dans une ambiance conviviale et familiale, les gens viennent donc se baigner jusqu'à mi-mollet, c'est très agréable et excellent pour la peau. Les pierres incrustées au fond du bassin vous massent la plante tandis que vous marchez, c'est étonnamment relaxant. La température varie en fonction des zones du circuit, et là où elle est la plus chaude, je suis ressorti précipitamment avec les pieds rouges version homard bien cuit. Assez rigolé, direction le ryokan.
Matsu no i sô, qu'on pourrait traduire par "Maison du puits du pin", est un peu éloigné du centre, et si on n'est pas véhiculé, il vaut mieux téléphoner pour que quelqu'un vienne vous chercher. Dès l'arrivée, on vous fournit un yukata, c'est-à-dire un kimono léger, qui ne vous quittera plus pendant tout votre séjour. La chambre que j'occupais était spacieuse, avec vue sur la petite vallée enneigée. Le sol est recouvert de tatamis. Au milieu de la pièce trône un kotatsu, c'est-à-dire une table basse chauffante. On glisse ses jambes en-dessous, et la douce chaleur retenue par la couverture vous enveloppe comme un cocon.
Le futon (matelas) est rangé dans le placard, le personnel l'installe pendant que vous prenez votre diner.
On vient dans un ryokan en famille, pour se régénérer après une journée de ski par exemple, ou bien en couple ou encore seul pour chercher un moment de paix. Les activités étant inexistantes aux alentours immédiats de l'auberge, aucune tentation ne peut venir vous perturber. La seule activité possible, c'est d'aller se baigner dans le onsen du ryokan.
Traditionnellement au Japon, le bain n'est pas fait pour se laver mais pour se relaxer. Sachant que le maillot de bain y est prohibé, les onsen sont rarement mixtes. L'eau étant partagée par tous, on se récure à fond et on se rince méticuleusement avant d'entrer dans le bassin fumant. Là, on se pose enfin et on respire. On prend le temps. Comme j'ai déjà entendu dire : "S'arrêter, c'est important. S'arrêter." Voilà, c'est ça. C'est maintenant. On souffle.
Mais le bonheur suprême, c'est le rotenburo, le bassin extérieur. A Matsu no i sô, le rotenburo était privatif : une petite pancarte à l'entrée indique si quelqu'un occupe déjà les lieux ou pas, ce qui permet par exemple aux familles de se baigner tous ensemble, la mixité y étant autorisée. Considérant la température extérieure, au moment d'enlever son yukata, on se dit qu'on est complètement fou de se déshabiller dehors. Puis quand on pénètre dans l'eau très chaude, pendant quelques secondes, on est pris entre deux feux. Le feu et la glace, plus précisément. On finit par se glisser complètement dans le bassin, où on peut enfin se prélasser bien au chaud. J'y suis retourné le soir, alors qu'il faisait nuit et que la neige tombait légèrement. Si je vous dis que c'est magique, ce mot me semble galvaudé. Hors du temps me parait un peu plus juste, mais la vérité, c'est que je ne trouve aucune expression apte à décrire une telle expérience. J'avais rarement savouré de sensations si oniriques.
Si on ajoute à ça que le ryokan, c'est aussi de la cuisine maison faite de produits locaux et de saison, vous aurez compris à quel point ce type de weekend est aussi bon pour le corps que pour l'esprit.
Que vous dire d'autre ? Que sur le chemin du retour, évidemment, la première question qui vient à l'esprit, c'est : "A quand la prochaine fois ?"
Matsu no i sô, qu'on pourrait traduire par "Maison du puits du pin", est un peu éloigné du centre, et si on n'est pas véhiculé, il vaut mieux téléphoner pour que quelqu'un vienne vous chercher. Dès l'arrivée, on vous fournit un yukata, c'est-à-dire un kimono léger, qui ne vous quittera plus pendant tout votre séjour. La chambre que j'occupais était spacieuse, avec vue sur la petite vallée enneigée. Le sol est recouvert de tatamis. Au milieu de la pièce trône un kotatsu, c'est-à-dire une table basse chauffante. On glisse ses jambes en-dessous, et la douce chaleur retenue par la couverture vous enveloppe comme un cocon.
Le futon (matelas) est rangé dans le placard, le personnel l'installe pendant que vous prenez votre diner.
On vient dans un ryokan en famille, pour se régénérer après une journée de ski par exemple, ou bien en couple ou encore seul pour chercher un moment de paix. Les activités étant inexistantes aux alentours immédiats de l'auberge, aucune tentation ne peut venir vous perturber. La seule activité possible, c'est d'aller se baigner dans le onsen du ryokan.
Traditionnellement au Japon, le bain n'est pas fait pour se laver mais pour se relaxer. Sachant que le maillot de bain y est prohibé, les onsen sont rarement mixtes. L'eau étant partagée par tous, on se récure à fond et on se rince méticuleusement avant d'entrer dans le bassin fumant. Là, on se pose enfin et on respire. On prend le temps. Comme j'ai déjà entendu dire : "S'arrêter, c'est important. S'arrêter." Voilà, c'est ça. C'est maintenant. On souffle.
Mais le bonheur suprême, c'est le rotenburo, le bassin extérieur. A Matsu no i sô, le rotenburo était privatif : une petite pancarte à l'entrée indique si quelqu'un occupe déjà les lieux ou pas, ce qui permet par exemple aux familles de se baigner tous ensemble, la mixité y étant autorisée. Considérant la température extérieure, au moment d'enlever son yukata, on se dit qu'on est complètement fou de se déshabiller dehors. Puis quand on pénètre dans l'eau très chaude, pendant quelques secondes, on est pris entre deux feux. Le feu et la glace, plus précisément. On finit par se glisser complètement dans le bassin, où on peut enfin se prélasser bien au chaud. J'y suis retourné le soir, alors qu'il faisait nuit et que la neige tombait légèrement. Si je vous dis que c'est magique, ce mot me semble galvaudé. Hors du temps me parait un peu plus juste, mais la vérité, c'est que je ne trouve aucune expression apte à décrire une telle expérience. J'avais rarement savouré de sensations si oniriques.
Si on ajoute à ça que le ryokan, c'est aussi de la cuisine maison faite de produits locaux et de saison, vous aurez compris à quel point ce type de weekend est aussi bon pour le corps que pour l'esprit.
Que vous dire d'autre ? Que sur le chemin du retour, évidemment, la première question qui vient à l'esprit, c'est : "A quand la prochaine fois ?"