lundi 3 octobre 2022

Petite promenade à vélo

 Voilà bien longtemps que je ne vous ai pas donné de mes nouvelles. Il faut dire que depuis que je suis rentré de France, mon emploi du temps s'est considérablement chargé. En effet, j'ai une collègue qui a arrêté l'enseignement, et du coup, j'ai récupéré une bonne partie de ses cours. Je suis donc bien occupé, et je n'ai pas beaucoup de temps pour les loisirs, et par conséquent pas grand-chose à vous raconter. C'est la routine.
J'aime ma routine. Mais des fois, j'aime bien aussi m'en détacher. Aussi, jeudi dernier, quand un de mes cours a été annulé, je me suis retrouvé avec une après-midi totalement libre devant moi, ce qui est devenu assez rare. J'aurais pu en profiter pour faire du ménage, me reposer, ou avancer sur mon boulot, mais j'ai choisi une autre option : j'ai enfourché mon vélo, et je suis parti prendre l'air.



C'est une balade que j'avais déjà faite une fois, l'année dernière. On rejoint d'abord la rivière Tone (prononcé "toné"), ou plutôt le fleuve Tone, la Tone-gawa si vous préférez. Puis on remonte le cours d'eau sur un petit sentier goudronné, loin de la circulation automobile. C'est calme et très agréable, surtout que ce jour-là, il fait beau mais pas trop chaud. On longe des zones rurales, des rizières (plutôt jaunes et à sec à cette saison), on voit de belles fermes anciennes, il y a aussi des hangars plus modernes mais un peu délabrés où vaches et cochons attendent d'être changés en steaks ou en saucisses. On entend le chant des cigales et autres insectes, ça stridule, ça crisse et ça grésille comme si l'air lui-même chantait. Les sauterelles sont en pleine saison des amours, il y en a partout qui s'accouplent sur le chemin, et quand on passe, elles sautent sans cesser de se faire sauter. C'est également le royaume des libellules, on en traverse parfois des nuages mordorés, c'est impressionnant. On peut encore admirer quelques ootaka, cet oiseau de la famille des éperviers qui a donné son nom à une ancienne forêt près de chez moi (forêt dont il ne reste qu'un petit bois puisqu'il a bien fallu laisser la place au centre commercial). En français, cet oiseau s'appelle l'autour des palombes, mais je suis sûr que, comme moi, vous n'aviez jamais entendu ce nom. Il y a aussi de nombreux oiseaux qui nichent sur les berges, comme les hérons cendrés, magnifiques.

Enfin, on arrive au bout de chemin, là où le fleuve forme une fourche, et se sépare pour donner naissance au fleuve Edo. C'est la pointe de la préfecture de Chiba. Sur l'autre rive, vers l'est, c'est la préfecture d'Ibaraki, et vers l'ouest, c'est celle de Saitama, on se situe donc exactement au point de jonction des trois préfectures. On trouve là un joli petit château, le Sekiyado-jô, littéralement l'auberge de la barrière, puisqu'autrefois, ce lieu était un important point de contrôle du trafic commercial fluvial. Aujourd'hui, c'est surtout le débit de l'eau qui est surveillé. Dans le château, un petit musée rappelle cette histoire.

Puis on prend le chemin du retour en longeant, cette fois, l'Edo. On ne peut pas se tromper de route, c'est toujours tout droit. Il n'y a pas de carrefour, pas de côte, pas de camion qui vous double dans un boucan effroyable, on a juste à pédaler et à savourer sans se prendre la tête. Un seul enquiquinement, quand même, parce qu'il en faut bien un : le vent vous souffle en pleine face sans vous laisser trente secondes de répit. J'avoue que les vingt derniers kilomètres ont été douloureux, surtout au niveau des genoux. Ah oui, parce que je ne vous ai pas dit : au total, la balade fait tout de même soixante kilomètres, et on les sent bien passer.


La nuit commençait déjà à tomber quand je suis revenu dans mon quartier, mais avant de rentrer chez moi, j'ai fait un détour par le drugstore m'acheter des genouillères, parce que je n'avais qu'une crainte : ne plus pouvoir marcher le lendemain ! J'ai bien souffert mais j'étais comblé, et même un peu bronzé. Un beau début d'automne.