dimanche 12 janvier 2020

Shibuya Scramble Square

Un nouveau building vient d'être inauguré dans le quartier de Shibuya. Il abrite essentiellement des bureaux et des boutiques, orientées sur le luxe et les produits haut de gamme. Un nouvel immeuble à Tôkyô, ça n'a rien d'extraordinaire, me direz-vous, et vous aurez raison. Sauf que situé en plein cœur du quartier, il offre une vue imprenable sur le fameux carrefour de Shibuya, et qu'en plus, une attention particulière a été apportée à la déco et à l'atmosphère. Une promenade sur le toit est une expérience qui va bien au-delà d'une simple visite de gratte-ciel. C'est une plongée dans l'ultra-modernité. Découverte du Shibuya Scramble Square.
A moins d'avoir la patience de prendre les escalators et de traverser tous les étages à pied, on doit emprunter l'ascenseur pour se rendre au 14ème étage, où la visite commence. Peu de choses à voir ici, l'étage est essentiellement occupé par le guichet où on peut acheter ses tickets pour accéder jusqu'au toit. Le mieux est encore de réserver en ligne en avance. C'est qu'il y a beaucoup de monde, et en attendant son tour, il ne fait pas forcément bon trainer ici. Quelques boutiques affichent des prix à faire pâlir (j'ai vu une paire de baguettes à 13 000 yens, soit plus de 100 €). Pour patienter, pas beaucoup d'autre choix que de se poser dans un café où là encore, les tarifs rappellent la rue de Rivoli. Malgré le gout amer que les prix donnent aux consommations, l'expérience commence à se faire sentir, comme les signes avant-coureurs de la montée d'une ecsta. Les éclairages doux, parfois en contre-plongée, la prédominance du bois d'un beige chaleureux, tout cela est furieusement dans l'air du temps. "L'air du temps", c'est bien l'expression qui m'est restée en tête pendant toute la durée de ma visite. Nous ne sommes qu'au 14ème étage, mais déjà la vue sur les néons de Shibuya invite l'esprit à divaguer sur notre monde moderne. C'est enfin l'heure de prendre l'ascenseur.
Si un designer de film de science-fiction devait imaginer le décor d'un immeuble futuriste, il dessinerait sans doute la salle où on embarque dans les ascenseurs. Le plafond est recouvert d'un écran où évoluent des couleurs psychédéliques, le tout au son d'une musique planante. On pense immédiatement au travail du collectif teamLab. Les murs sont eux d'un noir mat et profond, jusqu'aux portes de l'ascenseur. Quand ces portes glissent et s'ouvrent sur la cabine tamisée où on pénètre, on a l'impression de participer à un rite de passage mystérieux. Puis la cabine s'élève, et le plafond ici aussi s'illumine, vous projetant bien au-delà du ciel. Vous êtes arrivés au 45ème étage.
Le noir domine toujours, mais zébré d'éclairs blancs intégrés dans les murs, le sol et le plafond. En longeant les couloirs, j'avais l'impression de me retrouver dans le film Tron, dans sa version la plus moderne. On passe déposer ses affaires aux consignes automatiques (les gros sacs et les perches à selfie sont interdits sur la terrasse, hallelujah !), et on peut sortir. Et là, on ne peut retenir un soupir époustouflé. Tôkyô vu d'en haut, c'est toujours impressionnant, mais ça l'est encore plus quand au lieu de le regarder par des fenêtres, on n'est séparé du vide que par une paroi vitrée. J'ai effectué ma visite de nuit, mais je pense que le panorama de jour doit être tout aussi saisissant, bien que totalement différent.
Enfin, un escalator vous emmène sur le toit. Là, il n'y a même plus de vitre, vous contemplez la cité comme vous le feriez de votre balcon. Sauf que vous êtes à 229 mètres. La terrasse est recouverte de bois, et la présence de cet élément naturel au beau milieu d'un maelstrom sur-industrialisé provoque un contraste déroutant. Étrangement, vous vous sentez bien. On peut s'assoir sur les marches, voire s'allonger sur des filets tendus, un peu comme sur un hamac en pleine forêt. Quelques canapés sont installés, et donnent l'image d'une terrasse de maison, ou de café, destinée à profiter de la nature environnante sans quitter son confort. Mais ici, la nature est une contre-nature absolue, et les lucioles sont les milliers de balises lumineuses rouges signalant le sommet des immeubles alentour. Moi qui suis un homme des bois, comment puis-je être autant fasciné par ce type de paysage ? A perte de vue s'étend la ville de l'homme contemporain. Il y a de quoi méditer. Toutes les demi-heures, de puissants spots s'allument, tournoient quelques instants avant de se dresser vers l'infini du ciel, comme la flèche immatérielle d'une cathédrale techno. L'ultra-modernité se fait mystique.
Retour à l'étage inférieur pour un petit tour intérieur. Du noir et de la lumière, encore, un peu comme au cinéma. L'espace est déconstruit par les transparences et les reflets de l'aménagement, on est un peu perdu, c'est agréable.
Puis il est temps de reprendre l'ascenseur. La projection du plafond vous ramène sur terre sans effacer totalement la sensation transcendantale qui vous a pénétré. Ce que vous avez vu là-haut, c'est votre monde. Réfléchissez-y.

1 commentaire:

  1. Impressionnant 🤗 dire que j'aurais presque pû vivre ça cette année 😜

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