dimanche 6 décembre 2020

Le mont Hinode

Ça faisait un moment que je n'avais pas eu l'occasion de crapahuter dans la montagne, et ça commençait à bien me manquer. Un gros besoin d'air frais m'étreignait, avivé sans aucun doute par le fait de vivre masqué à longueur de journée. Pour cette reprise, j'ai choisi le joliment nommé mont Hinode, "mont de l'aurore". Par un beau dimanche matin, de très bonne heure, j'ai donc pris le train direction l'ouest de Tôkyô.
Après environ 1h30 de trajet, je suis arrivé à la gare de Musashi-Itsukaichi, une petite ville rurale quelconque. L'entrée du chemin est difficile à repérer, mais heureusement, un très aimable préposé à l'office du tourisme m'a gentiment renseigné et donné une carte, alors que le bureau n'était pas encore ouvert. Après encore quelques hésitations, j'ai fini par trouver l'accès au sentier qui s'élevait à travers bois.
Dès le premier pas, j'ai pris une profonde, très profonde inspiration. Oh, que c'était bon de se retrouver face à cette verte immensité escarpée ! Un panneau avait beau m'avertir de la présence éventuelle d'ours, je n'y voyais là que la promesse d'une nature indomptable. Bon, je n'ai pas vu d'ours, même pas le moindre petit écureuil (logique, en même temps : s'il y a des ours, les écureuils doivent se faire discrets !😁). Mais tout en marchant, je souriais tout seul comme un imbécile heureux, très heureux.
Le léger sfumato qui voilait le ciel s'est rapidement dissipé, laissant apparaitre un soleil radieux. Une lumière d'automne inondait les sous-bois, et les pins exhalaient de toute leur sève un parfum rafraichissant. Sur certains tronçons, le chemin montait de façon très abrupte, pour ensuite se transformer en simple sentier de promenade. L'air était pur et froid, mais je sentais que mon dos était trempé de sueur. J'ai croisé très peu de randonneurs, ce qui a permis à mon cerveau de faire, le temps de quelques heures, le vide de toute société. Seul dans la nature, c'était exactement ce que je recherchais. Et puis surtout, quel plaisir que de pouvoir marcher si longtemps sans être obligé de porter un masque ! Je me suis rempli les poumons de cette fraicheur. Concernant le niveau de difficulté, j'avoue que les 500 derniers mètres ont été éprouvants. Mais, comme souvent, la difficulté n'entrave pas mon plaisir, elle en fait partie.
Après trois heures de marche, j'ai donc atteint les 902 mètres du sommet, et j'ai été bien surpris de constater qu'il y avait là beaucoup de monde qui piqueniquait. Si peu de randonneurs sur le chemin et tant de monde au sommet, d'où venaient-ils ? Ils avaient sans doute emprunté le sentier plus facile et bien plus court, celui recommandé pour les familles, qui part de la station thermale à proximité. Ou bien ils venaient du mont Mitake, non loin, car un circuit combiné est possible, si on en veut encore.
En ce qui me concerne, j'étais repu, et je suis redescendu par l'autre côté de la montagne. J'ai croisé encore moins de monde qu'à la montée, ce qui me procura le sentiment de plonger dans un paysage encore plus sauvage. L'illusion de la solitude est enivrante, presque inquiétante.
Arrivé dans une petite ville encore plus insignifiante que celle d'où j'étais parti, j'ai trouvé la minuscule gare où ne passe qu'un train toutes les 30 minutes. En tout, j'ai dû marcher environ 10 kilomètres ce jour-là. Je suis rentré à Tôkyô harassé, exténué, rompu, mais comblé et apaisé.












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