mardi 15 juin 2021

Akira

 Akira est un prénom japonais (masculin le plus souvent, mais qui peut être utilisé au féminin), et c'est aussi le titre d'un célèbre manga. Vous le savez, ce blog n'a aucunement vocation à distiller un savoir encyclopédique sur le Pays du Soleil Levant, mais il est destiné à partager avec vous mes expériences d'expatrié. Il peut donc sembler inopportun de traiter d'un manga ici, et peut-être cet article barbera-t-il plus d'un de mes lecteurs habituels. Pourtant, cette œuvre ayant constitué une de mes portes d'entrée dans la culture nippone, j'aimerais vous raconter un peu à quel point Akira est important pour moi.
Akira est donc un manga - autrement dit une bande dessinée japonaise - écrit et dessiné par Katsuhiro Ôtomo, et dont le lectorat principal est plutôt masculin et mature, c'est-à-dire constitué de garçons adolescents et d'hommes adultes. Ce n'est bien sûr pas limitatif, et on parle ici en terme de cœur de cible et de stratégie commerciale. Comme c'est très souvent le cas, ce manga est d'abord paru par épisodes dans un magazine spécialisé entre 1982 et 1990, avant d'être publié en version reliée. Un film d'animation, sorti en 1988, a été adapté du manga pour le cinéma. Si on y retrouve bien le même thème et les mêmes personnages principaux, le scénario comporte toutefois quelques différences avec l'histoire originale, notamment concernant le traitement du personnage d'Akira en lui-même.
Voici le pitch : nous sommes en 2031, après la 3e Guerre mondiale. Tôkyô a été rasée puis rebâtie sous le nom de Néo-Tôkyô. Alors que la cité nouvelle s'apprête à recevoir les Jeux Olympiques (oui oui !), une bande de jeunes délinquants erre à travers la ville à moto. Suite à un accident, l'un d'eux, Tetsuo, va voir se développer en lui d'étranges pouvoirs qui vont devenir incontrôlables. Difficile de résumer l'ensemble de l'action. Le récit mêle manipulations génétiques et expériences secrètes, politique et religion, terrorisme et mouvements révolutionnaires... La trame se développe ainsi jusqu'au nouvel anéantissement de Néo-Tôkyô (en 1991, les médias n'ont pas manqué de remarquer la ressemblance frappante entre les images du tsunami ayant ravagé les côtes du Japon et les images du cataclysme imaginé par Katsuhiro Ôtomo), anéantissement qui n'est en fait que le point de départ d'une nouvelle histoire.
Je ne m'étendrai pas davantage sur l'univers d'Akira, mais comme vous le voyez, on a affaire à une œuvre très riche et complexe, soutenue par un questionnement profond sur le devenir de l'humanité.
La première fois que j'ai entendu parler d'Akira, c'était à l'occasion de la sortie française du film. En matière d'animation japonaise, je m'étais arrêté à Candy et Goldorak, et bien que j'aie été profondément marqué par ces programmes télévisés de mon enfance, je n'en gardais pas une très bonne image en ce qui concernait la qualité de l'animation. Quel choc ce fut donc que de découvrir les extraits du film Akira, et de constater les étapes franchies depuis les dessins animés d'autrefois ! Décors ultra-travaillés, mise en scène aussi élaborée que pour un film live, effets lumineux d'un dynamisme et d'une beauté complètement novatrice, le réalisateur frappait fort. Je me précipitai alors chez mon marchand de journaux pour me procurer la version BD, qui commençait à être distribuée en France. Akira était d'ailleurs un des premiers mangas à paraitre chez nous, tous les quinze jours d'abord, puis une fois par mois. J'ai aussitôt été totalement conquis par la violente énergie qui se dégageait de chaque case. Dès que possible, je me suis rendu à Paris, dans la seule salle qui diffusait le film. A l'époque, ce type de cinéma était encore assez confidentiel en France. Là encore, ce fut un 
choc énorme et un coup de foudre complet. C'est sans doute à partir de là que mon attirance pour la culture nippone est devenue plus manifeste.
Une trentaine d'années plus tard, je m'exilais sur l'archipel.
C'est d'ailleurs à l'occasion du trentenaire du film qu'était organisée, l'année dernière, une exposition consacrée au phénomène. En effet, Akira n'a pas pris une ride et, loin de sombrer dans l'oubli, reste une œuvre majeure dans la culture pop. L'expo était bien trop petite à mon gout, mais j'ai pu m'y procurer un prospectus annonçant un concert de la bande originale du film. Précisons que cette musique est elle aussi devenue culte pour tout geek qui se respecte. Vous en avez d'ailleurs entendu plusieurs extraits dans le petit montage que j'avais réalisé il y a un an. Ni une ni deux, j'ai acheté un billet pour le concert, pas question de rater ça. A ce moment-là, on ne parlait pas encore du coronavirus, ou si peu... Quelques mois plus tard, la crise sanitaire prenant de l'ampleur, le concert prévu en mai 2020 fut repoussé en octobre. Mais quand octobre fut venu, la crise n'était toujours pas passée, et le concert fut encore décalé jusqu'en mai 2021. Le mois dernier, j'ai enfin pu assister au spectacle pour lequel j'avais donc acheté mon billet... avec un an et demi d'avance !
Inutile de vous dire à quel point le rendez-vous était attendu. Aussi surprenant que cela puisse paraitre pour un film de science-fiction japonais, cette musique est essentiellement jouée par des instruments à percussion traditionnels venus d'Indonésie. Je n'ai évidemment rien pu filmer du concert, mais le spectacle s'est avéré à la hauteur de mes espérances aiguisées par l'impatience. Parfait, absolument parfait. Pour vous donner une petite - très petite et très vague - idée du résultat, vous pouvez visionner cette vidéo.
Après une si longue attente, les musiciens étaient à fleur de peau, au moins autant que le public, et plus d'un étaient en larmes à la fin du concert.
Quant à moi, même si je louchais sur le blouson d'un des spectateurs, reproduction du blouson porté par Kaneda, héros de la série (une pilule de drogue avec inscrit "Good for health, bad for education"), je me suis dit que ça n'allait finalement pas être facile à porter en tant que prof, et je me suis contenté d'un tee-shirt très sobre (mon deuxième sur le thème d'Akira).
Les mangas passent, Akira reste.

2 commentaires:

  1. Merci Ludo pour ce nouvel article.
    Je te souhaite avec un retard qui dépasse le raisonnable.. Milles excuses, Un Joyeux anniversaire...
    J'espère que ta nouvelle vie se passe bien..
    Des bises d'été

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  2. Impressionnants ces instruments de musique !!! Merci Ludo pour ces explications et ce partage de belles émotions 😉

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