La période traditionnelle des vacances d'été touche à sa fin, aussi bien en France qu'au Japon. Les jeunes retournent à l'école, les adultes retournent au travail, on dirait que quelque chose meurt. J'ai la chance d'habiter dans un pays où la belle saison se prolonge en septembre, mais je ne peux pas m'empêcher, moi aussi, de regarder avec nostalgie les deux mois qui viennent de s'écouler. Des instants fragiles, beaux et précieux comme de la porcelaine.
Même si au Japon, on continue de travailler en juillet et en aout comme si de rien n'était, ce sont la température et surtout l'humidité dans l'air qui vous font sentir qu'il s'agit d'une saison spéciale. Dans la journée, le thermomètre oscille entre 30° et 35°, et le taux d'humidité affiche rarement moins de 60%, monte souvent à plus de 80%, je l'ai même déjà vu atteindre le pic de 97%. Inutile de vous dire à quel point le corps a du mal à évacuer la chaleur. Quant aux températures, on parle là, bien sûr, des relevés à l'ombre. J'ai un thermomètre sur mon balcon, et un jour, comme ça, je l'ai posé directement en plein soleil, pour voir. En quelques secondes, le mercure est monté au maximum de la graduation : 50°. Ce qui signifie donc que quand vous marchez dans la rue et que le soleil touche votre peau, vous êtes cuits à plus de 50°. On comprend mieux pourquoi l'usage de l'ombrelle, totalement passé de mode en France, reste absolument banal au Soleil Levant.
La piscine près de chez moi est une piscine extérieure, et n'est ouverte que pendant les deux mois d'été. Comme je travaille beaucoup, je n'ai pas pu y aller autant que les années précédentes, mais dès que j'avais un créneau, entre deux cours, je me précipitais là-bas. Sauf que des fois, c'était fermé. Pourquoi ? Parce que la température de l'air additionnée à celle de l'eau dépassait les 70°. Dans ce cas, l'eau ne suffit plus à vous rafraichir, et vous risquez un coup de chaleur, accident typique de la saison qui n'est pas à prendre à la légère. Ce ne sont pas seulement les personnes fragiles qui y succombent, j'ai entendu le cas d'une jeune fille de 13 ans qui est morte alors qu'elle jouait au tennis.
Comme certains de mes apprenants sont partis en vacances, ça m'a quand même laissé quelques moments de repos, et j'ai essayé d'en profiter à fond. Je me suis offert une belle balade à vélo, comme je n'avais pas eu l'occasion d'en faire depuis longtemps. Je voulais voir si mon genou tiendrait, il a tenu ! Une trentaine de kilomètres autour du lac, c'était super agréable, et ça m'a permis d'admirer les nuages si caractéristiques de l'été. Et puis pour moi, été est également synonyme de plage. C'est sans doute une réminiscence de mon enfance : quand j'étais petit, on allait tous les ans en Corse, et même maintenant, adulte, j'éprouve toujours le besoin de me baigner au moins une fois dans la mer en juillet ou en aout. Alors dès que j'ai pu, hop, j'ai sauté dans le train et j'ai fait de l'autostop direction la plage la plus proche de chez moi. Une simple petite plage de sable, avec des restaurants provisoires et des maitres-nageurs aux aguets, parfait. La mer était chaude, les vagues étaient fortes, de quoi s'amuser dans l'eau (et repartir avec des algues plein le maillot), le sable bouillant au point que ça brulait les pieds, impossible de marcher sans chaussures, et le bruit des vagues pendant que je bouquinais, et le soleil qui me tapait dessus et moi qui adorais ça, un doux parfum de vacances même si je bossais le lendemain, du bonheur en barre.
En été, il fait trop chaud pour faire du kendô, alors les horaires sont décalés, on appelle ça asa-geiko, entrainement du matin. Ça peut paraitre dingue de se lever à 5h le dimanche pour aller se faire taper sur la tête, mais en fait c'est super. L'entrainement a lieu de 6h à 7h, il ne fait pas encore trop chaud (en fait si, il fait déjà super chaud, mais moins que quelques heures plus tard), et après la douche, on se sent en pleine forme et on a la journée devant soi. Mais avant que les horaires changent, pour marquer le début de l'été, le club a organisé un mini-évènement pour les enfants. On dispose une pastèque dehors sur une grande bâche, et on bande les yeux des volontaires. L'enfant aux yeux bandés tient un solide bâton, et les autres enfants le guident avec la voix. Le but du jeu est de casser la pastèque d'un coup. Bien sûr, les enfants sont surexcités, certains donnent volontairement des indications trompeuses, mais tout le monde s'amuse. Une fois les pastèques bien éclatées, on repart chacun avec plusieurs parts dans un sachet (pas des belles tranches bien nettes, du coup, mais ça ne change rien au gout !). Je connaissais cette tradition à travers les mangas, mais je ne l'avais jamais vue, et j'étais très content d'y assister. L'été est aussi la saison des figues, un de mes fruits préférés, et je ne me suis pas privé, je n'en avais jamais mangé autant de ma vie.
En général, je me fais souvent du thé (surtout depuis que je me suis fait offrir de quoi me faire des latte, avec une belle mousse au lait), mais impossible de boire une boisson chaude en été sans se taper de grosses suées, alors j'ai changé d'option, et je me suis acheté une machine à faire des kakigôri, c'est-à-dire des granités, c'est-à-dire de la glace râpée avec du sirop. On peut agrémenter la glace avec des fruits ou de la confiture, ce genre de choses, et je me suis lancé à expérimenter mes propres recettes. C'est une machine de base, on fait tourner la manivelle à la main, mais c'est ça qui me plait, ce côté artisanal. Les kakigôri m'ont bien aidé à me rafraichir, j'en mangeais en général deux par jour, et pour rigoler, je me suis même acheté un gros kakigôri gonflable pour décorer mon appartement ! Vous pouvez voir d'autres photos de kakigôri sur mon compte Instagram.
Pour répondre à mon besoin de prendre l'air, j'avais prévu une randonnée sur deux jours en montagne, avec une nuit dans un refuge, et j'avais vraiment hâte, mais j'étais un peu inquiet à cause d'un typhon qui approchait. Je me suis levé très tôt, j'ai pris ma douche et mon petit déjeuner, j'étais prêt à partir, mais juste avant d'enfiler mes chaussures de marche, j'ai regardé une dernière fois les prévisions météo, et là : alerte aux orages. Ce n'était pas directement le typhon, qui passait plus au sud, mais c'était des perturbations drainées par la spirale du typhon, et ça s'annonçait intense. S'il ne fait pas beau, s'il y a des nuages, ça ne me dérange pas trop, mais des orages en montagne, ça peut être dangereux, et la mort dans l'âme, j'ai dû annuler ma sortie à la dernière minute. Je me suis promis que ce n'était que partie remise.
Je me suis rattrapé quelques jours plus tard en m'évadant à Nebukawa, dans un petit chalet avec onsen, mais ça, j'ai déjà eu l'occasion de vous le raconter ici.
Et puis cet été, j'ai bloqué mes samedis et mes dimanches pour lever un peu le pied au niveau du rythme du travail, et pour me libérer du temps pour aller danser le bon-odori dans les matsuri, mais ça, je vous le raconterai bientôt...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire