Ginza est un quartier d'affaires au cœur de la capitale, où les immeubles flambant neufs donnent à la cité une image d'ultra-modernité. Il survit pourtant, au milieu de ces blocs de verre et de fer, un ilot de nostalgie, vestige d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre. C'est l'immeuble Okuno, ou Okuno building.
Construit au début des années 30, ce bâtiment était à l'époque, lui aussi, considéré comme ultra-moderne, non seulement du fait de sa structure métallique qui lui permettait de résister aux séismes, mais aussi de son ascenseur, équipement nouveau et encore rare.
Malgré l'évolution permanente des normes antiincendies et antisismiques, l'immeuble a miraculeusement réussi à sauver sa peau alors qu'autour, des constructions de plus en plus hautes, lumineuses et sécurisées s'aggloméraient comme sur le théâtre d'une expérience baroquement futuriste.
Au début des années 2000, le vaillant vieillard était toujours debout, et, ses habitants séculaires déménageant les uns après les autres vers une résidence céleste bien plus élevée que les immeubles alentour, et sans doute plus paisible, ce sont des galeries d'art qui se sont installées dans ce qui furent des appartements. L'excellente idée qu'ont eue les nouveaux occupants est de ne pas avoir cherché à moderniser les lieux. Certes, quelques aménagements ont été réalisés ça et là, en particulier dans lesdits appartements, mais toutes les parties communes sont restées telles quelles. Il est par exemple toujours possible d'emprunter l'ascenseur, dont les grilles se ferment manuellement. La peinture n'a pas été refaite depuis des lustres, et s'écaille comme si le bâtiment était à l'abandon. Le lino non plus n'a pas été changé et la trace des millions de pas évoque des lignes de vies invisibles qui sont passées par là des millions de fois.
Ainsi, l'immeuble est non seulement le témoin d'un temps révolu, mais aussi le témoin du temps qui s'écoule. Le site est enveloppé d'un charme vétuste et à déambuler dans ces couloirs, on en vient à se demander si on est un train de visiter une maison fantôme, ou bien si ce sont nous, les fantômes.
On ne peut visiter l'immeuble Okuno que les jours d'ouverture au public, c'est gratuit, et malgré la renommée du site, les promeneurs ne se bousculent pas. Outre les galeries d'art et d'artisanat, donc, on y trouve aussi de petites boutiques d'antiquités très rares et très chères. Décidément, le passé est un luxe qu'il est bon de considérer quelques instants. Arrêter le temps. S'arrêter.
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