lundi 20 mai 2019

Le quartier chinois de Yokohama

A ma connaissance, Yokohama, dans la banlieue sud de Tôkyô, n'est pas une ville où la communauté chinoise est spécialement implantée, pas plus ici qu'ailleurs en tout cas. Le quartier chinois y est pourtant particulièrement réputé.
Les Chinois résidant au Japon sont assez nombreux, c'est même, avec les Coréens, une des communautés étrangères les plus présentes. Ceci ne va d'ailleurs pas sans poser quelques difficultés pour le vivre ensemble. Les Japonais ont été politiquement - et donc culturellement - fermés à l'étranger jusqu'à la fin du 19ème siècle, et ne sont pas habitués à composer avec l'altérité, même si les influences chinoises (à commencer par l'écriture) sont légion. Pour nous, Français, dont la culture est au contraire issue d'un immense brassage réunissant tous les pays qui ont traversé le territoire au fil des siècles, ce n'est déjà pas facile d'accepter la différence, et les idées racistes et xénophobes semblent avoir le vent en poupe. Alors pour les Japonais, l'accueil de la diversité n'a rien de spontané. En tant qu'Occidental, je n'ai jamais été victime de racisme, mais je sais que les Chinois et les Coréens au Japon sont un peu comme les Arabes et les Noirs en France, les boucs émissaires typiques des frustrations et des inquiétudes des locaux. Dans les discours de l'extrême-droite japonaise, ce sont souvent les Coréens qui sont pris pour cible.
Je ne connais pas trop la culture coréenne, mais il est vrai que la culture chinoise apparait parfois difficilement compatible avec la culture japonaise, tant les deux sont opposées. Le respect obsessionnel des règles et du protocole des Japonais se heurte au mépris de ces mêmes règles par les Chinois, pour qui, par exemple, bousculer est naturel là où les Japonais vont consciencieusement faire la queue en évitant - autant que possible - tout contact physique avec leurs voisins. Il y a quelques années, des Chinois avaient fait la une des journaux télévisés lors d'un hanami, parce qu'ils grimpaient dans les arbres pour secouer les branches et faire tomber les fleurs de cerisiers, afin de faire de plus belles photos. Quand on connait le culte que les Japonais vouent à ces fleurs, on imagine bien leur choc.
Pourtant, ici comme ailleurs, la tolérance et l'ouverture devraient être les maitres mots de part et d'autre des communautés pour apprendre à se connaitre et à se respecter, à l'heure où l'inéluctable mondialisation peut soulever autant de problèmes qu'apporter de réponses. L'humanité doit évoluer, à chacun d'entre nous de la faire évoluer dans la bonne direction. Ça peut commencer par un petit pas, comme par exemple une promenade dans le quartier chinois de Yokohama, pour revenir à nos moutons !
Moi qui ai souvent arpenté le quartier chinois de Paris (dit quartier chinois, mais en vérité tout autant quartier vietnamien), j'étais bien content de retrouver cette ambiance animée. Le parfum de la soupe pho me manquait un peu, mais les canards laqués accrochés dans les vitrines des restaurants étaient bien là. Par contre, la présentation, quand on mange ce même canard, est complètement différente de ce que j'avais connu, et j'ai été un peu déçu, même si c'était délicieux. Pour tout dire, plus que le 13ème arrondissement, je me croyais revenu à Hong Kong. L'architecture et la décoration aussi, sans parler des temples, m'ont fortement rappelé mes quelques voyages dans ce territoire chinois. J'ai mangé dans un restaurant "buffet à volonté", autant vous dire que je m'en suis mis plein la panse. Et puis j'étais également très content de retrouver certaines friandises dont je me régalais en France et qu'on ne retrouve pas si facilement au Japon.
Bref, un mini-voyage gastronomique sans quitter le pays !

dimanche 12 mai 2019

Les azalées

A peine les sakuras, chargés de mélancolie, ont-ils disparu, dispersés aux vents, apothéose du printemps, marque-pages de nos adieux, ce sont les azalées (tsutsuji) qui éclosent comme un signe avant-coureur de l'été.
Il n'y a plus de fleur dans les arbres, mais de la mi-avril à la mi-mai, dans les villes et les villages, le moindre jardin, le moindre parterre, le moindre massif de verdure se parent de pétales ensoleillés. Du blanc au violet en passant par toutes les nuances de rose, voilà une sublime consolation qui arrive, un bonheur presque trop grand après une si belle tristesse.
Le jardin du sanctuaire de Nezu, dans le quartier de Yanesen, s'en est fait une spécialité. Une splendeur. Et encore, lors de ma visite, beaucoup de fleurs avaient déjà commencé à perdre de leur vivacité et de leur éclat. J'ose à peine imaginer ce que ça peut donner en plein pic de floraison. Un parfum rond, entre le miel et le bonbon aux fraises, vous enveloppe, vous enivre, et vous voilà reparti dans vos rêveries chatoyantes et nostalgiques.



dimanche 5 mai 2019

Sawara

Comme pour Shibamata, Sawara n'est pas le genre d'endroit qu'on visite si on ne réside pas au Japon sur le long terme. Cette petite ville, à environ 1h40 à l'est de Tôkyô, n'est indiquée dans aucun guide touristique. Du reste, si les touristes sont bien là, très peu viennent de l'étranger, et j'étais, lors de ma visite, assurément le seul Occidental à y déambuler. Il faut avouer que Sawara n'a rien d'extraordinaire, on n'y trouve pas de château, pas de musée pittoresque, pas de spécialité culinaire... Mais la cité a su préserver, à l'instar de Kawagoe, son centre-ville historique, et c'est de là que vient tout son intérêt. Le canal qui traverse le vieux Sawara est bordé de maisons traditionnelles, en bois pour la plupart, coiffées de toits à l'ancienne, conférant au paysage un charme typiquement japonais dont je ne me lasse pas. Ce n'est pas pour rien si Sawara - tout comme Kawagoe d'ailleurs - est surnommée "la petite Edo" (Edo étant l'ancien nom de Tôkyô).
Certes, il faut moins d'une heure pour parcourir les deux ou trois jolies rues de la bourgade, mais cette promenade procure une profonde sensation de douceur et de paix. Baguenauder dans Sawara nous plonge instantanément dans le Japon tel qu'on le voit dans les films d'époque, ceux de Kurosawa par exemple, et on se prend alors à rêver aux peintures archétypales qui ont construit, jusqu'en Occident, notre imaginaire nippon. Ce Japon, loin du tumulte de la capitale, a bel et bien existé, Sawara en est la preuve vivante, le souvenir coloré, l'étincelle précieuse.
Pour couronner la visite, il est possible de faire un petit tour en bateau sur le canal. Un moment idéal pour savourer le monde flottant...