Entre le quartier de Shibuya et celui de Shinjuku, à l'ouest de Tôkyô, il y a le quartier de Harajuku. Il n'est pas très étendu géographiquement, mais il offre de multiples visages. Ainsi, on y trouve le parc Yoyogi, où les tôkyôïtes se rendent en masse dès qu'il fait beau, le Meiji Jingu, un temple très réputé... Tout ça, ça fait partie du circuit touristique classique (que j'avais fait lors de mon tout premier séjour au Japon).
Et puis il y a des choses moins classiques, beaucoup moins classiques...
Par exemple, à l'entrée du parc Yoyogi, le weekend, des rockeurs (et quelques rockeuses) se réunissent pour danser. Des rockeurs genre rockabilly, avec blouson noir ou veste en jean, et une banane à la Margerin. Et c'est quelque chose, je vous assure...
Continuons notre promenade... A deux pas de ces fous furieux du bon vieux temps du rock'n roll, on tombe sur la Takeshita Street, étroite rue piétonne joyeuse et bondée.
Harajuku est surtout réputé pour être un temple de la mode. Quand je dis "mode", ici, je ne parle pas spécialement des grands couturiers, de la mode qu'on voit dans Elle (pas même dans Elle Japon), de la mode institutionnalisée, tout ça... Non, à Harajuku, c'est la mode de la rue, spontanée, créative, amusante, la mode où on peut tout se permettre, surtout si c'est osé, extrême, haut en couleurs. Pour ceux qui connaissent, la chanteuse Kyari Pamyu Pamyu est un exemple typique du style Harajuku, une véritable ambassadrice du quartier. Et Harajuku, c'est aussi un haut lieu du cosplay (contraction de "costume player", c'est-à-dire le fait de se déguiser en personnages de manga, de dessin animé, de jeu vidéo, de film, etc.). Bref, on croise des looks de folie tous les dix mètres, et tout le monde a le sourire aux lèvres. Personne ne se prend trop au sérieux, on est là avant tout pour se faire plaisir, et les gens acceptent facilement de poser pour vous. C'est d'ailleurs, à mon avis, une des caractéristiques du Japon : en général, on ne se prend pas trop au sérieux, même si on fait les choses sérieusement. On se donne à fond pour un truc, mais ça ne procure pas la grosse tête. Voici donc quelques personnages entraperçus lors de ma déambulation.
Oui oui, on peut même croiser Spiderman et Captain America qui achètent une crêpe, pépère... Les crêpes, c'est d'ailleurs la spécialité culinaire de Harajuku.
Vu les looks délirants de Harajuku, il n'est pas étonnant qu'on trouve en plein cœur de ce quartier un bar nommé le Kawaii Monster Café, autrement dit le café des monstres mignons. Les consommations n'ont rien d'extraordinaire, mais la déco... On est en plein psychédélisme kawaii, à mi-chemin entre l'univers de Tim Burton et celui de Lewis Carroll. C'est, comme son nom l'indique, à la fois gai et horrifique.
Le comptoir par exemple, il ressemble à une espèce de méduse multicolore. Les murs sont recouverts de cornets de glace éclatés, de macarons, ou d'animaux roses dignes d'un cauchemar de Füssli, tout ressemble à des bonbons écœurants (et ceux qui me connaissent bien savent que j'adooore les bonbons écœurants !).
On sert les consommations dans des éprouvettes ou des tubes à essai, les couleurs sont bizarres, mais c'est bon, pas de danger.
Et au milieu trône un gâteau géant qui tourne comme un manège...
Pas facile de prendre des photos dans ce bar, parce qu'avec l'éclairage type discothèque, les lumières et les couleurs changent tout le temps, mais j'espère qu'avec ça, vous avez une bonne idée de l'ambiance de Harajuku.
Cette ambiance me fascine, et je ne saurais pas dire en quoi, exactement, elle s'accorde avec mon imaginaire intime. Ce trip régressif totalement assumé, c'est comme si, à Harajuku, on pouvait savourer les plaisirs de l'enfance avec une intelligence d'adulte, comme si l'expérience de la vie ne nous éloignait pas de l'innocence, mais au contraire la rendait encore plus forte. Se plonger dans Harajuku, ce n'est pas vraiment vivre une deuxième enfance, c'est plutôt chercher la voie de l'innocence de l'adulte, la légèreté dans la maturité. J'extrapole sans doute, mais peut-être qu'au Japon, la prise de conscience de la mort, qui vient avec l'âge, loin de nous assombrir, nous fait davantage apprécier les bonbons roses. C'est parfois le genre de pensées qu'éveille en moi la culture pop japonaise.
Cette ambiance me fascine, et je ne saurais pas dire en quoi, exactement, elle s'accorde avec mon imaginaire intime. Ce trip régressif totalement assumé, c'est comme si, à Harajuku, on pouvait savourer les plaisirs de l'enfance avec une intelligence d'adulte, comme si l'expérience de la vie ne nous éloignait pas de l'innocence, mais au contraire la rendait encore plus forte. Se plonger dans Harajuku, ce n'est pas vraiment vivre une deuxième enfance, c'est plutôt chercher la voie de l'innocence de l'adulte, la légèreté dans la maturité. J'extrapole sans doute, mais peut-être qu'au Japon, la prise de conscience de la mort, qui vient avec l'âge, loin de nous assombrir, nous fait davantage apprécier les bonbons roses. C'est parfois le genre de pensées qu'éveille en moi la culture pop japonaise.