Oku Nikkô
Nikkô est une petite ville située à environ deux heures au nord de Tôkyô. Elle est surtout réputée auprès des touristes (japonais et étrangers) pour ses nombreux temples et sanctuaires inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco. J'avais déjà eu l'occasion de m'y rendre en janvier 2017, et je vous avais raconté cette excursion dans cet article, que je vous invite à relire. Je m'étais promis de revenir, ce que je viens de faire. Mais cette fois-ci, je ne me suis pas arrêté à Nikkô-même, et je suis allé bien au-delà de la ville principale pour me rendre à Oku Nikkô.
On pourrait traduire littéralement Oku Nikkô par "au fond de Nikkô", ou par "le Nikkô profond". En effet, une fois arrivé à la gare, il faut encore prendre un bus qui vous emmène en serpentant sur une route sinueuse à l'ascension de la montagne. Et quand je dis "ascension", ce n'est pas une figure de style : ça monte raide ! Comme nous étions au moment d'un weekend prolongé, le trafic était chargé, et il m'a fallu une bonne heure et demie pour rallier ma destination. Quand on a envie de faire pipi, le trajet prend des allures d'exercice zen que je ne conseille à personne.
On arrive donc au bord d'un lac ceinturé de montagnes, le genre de paysage que j'affectionne particulièrement, et le grand air vous saisit aussitôt. Il faisait déjà bien plus frais à Nikkô qu'à Tôkyô, mais à Oku Nikkô, la fraicheur laissa place à un froid mordant. Prévoyant, j'avais bien emporté mon petit anorak, mais ni mes gants, ni mon bonnet, ni mon écharpe... et je le regrettai immédiatement. Oku Nikkô, c'est bel et bien la montagne, et la montagne en novembre, ça caille sa mère.
Moi qui avais donc hâte de me pelotonner dans le confort et la chaleur du ryôkan où je me rendais, je suis tombé de haut. Plutôt que d'une auberge traditionnelle, il s'agissait en fait d'un hôtel classique, avec une chambre certes à la japonaise, mais trop étroite pour s'y sentir à l'aise. Par ailleurs, le bâtiment était mal insonorisé, et toute la soirée (ainsi que la matinée du lendemain), ce ne fut que portes qui claquaient, ramdam des bruits de pas dans le couloir, et échos des conversations dans les chambres voisines. Je ne parle même pas de l'aspirateur en guise de chant d'adieu alors que j'essayais de me reposer avant de quitter les lieux.
En plus, dans un ryôkan, habituellement, un de mes gros plaisirs est le repas traditionnel. Là, le repas se prenait dans l'hôtel d'à côté, et la cuisine était tout ce qu'il y avait de plus occidental. Bon, OK, c'était très bon, il aurait plus manqué que ça.
Quant au onsen, il n'y avait en fait rien d'autre qu'une simple salle de bain, et comme j'étais scrogneugneu je vais dire une salle de bain toute pourrie où on pouvait même pas allonger ses jambes dans la baignoire, quant à y tenir à deux, c'était possible, mais seulement avec les genoux sous le menton, bonjour la détente.
Ah, j'oubliais le détail qui tue : pour se pelotonner dans le confort et la chaleur machin machin, il fallait choisir entre une chambre glaciale et une chambre surchauffée par un genre de poêle au mazout qui pue. Entre les deux, il y avait pas.
Oui, même au Japon, ce genre de déception (quelqu'un a un autre mot à me proposer ?), ça arrive.
On va se consoler en disant que la vue sur le lac était jolie...
Car heureusement, Oku Nikkô recèle d'autres centres d'intérêt que ses hôtels miteux, et l'environnement naturel, en particulier, y est fort attrayant.
Le petit temple Chûzenji par exemple, perché à flanc de montagne, est joli comme tout. Comme nous sommes en pleine saison des kôyô, la végétation exhibait ses rouges, jaunes et ocres avec fierté, et le paysage était splendide. Pour rappel, les kôyô, c'est quand les feuilles des arbres se parent de leurs couleurs d'automne, je vous en avais déjà parlé ici ou là.
Après, je suis allé visiter un petit musée consacré à l'écologie régionale. Outre la richesse de la flore, les montagnes alentours abritent, parait-il, pas mal d'ours et de singes. Pour nous, Français, ça sonne tout de suite exotique, mais pour les Japonais, c'est assez banal.
Enfin, en quittant le musée, réchauffé, je suis allé voir une cascade située à deux pas. Une cascade de 97 mètres, tout de même ! Impressionnante ! On peut prendre un ascenseur pour admirer la cascade d'en bas, la vue vaut vraiment le coup.
Puis il était temps de rentrer sur Nikkô pour prendre le train. Mais afin de profiter jusqu'au bout de mon weekend, j'avais réservé mon billet retour vers 19h. Ce que j'avais oublié, c'est qu'à partir de 17h, Nikkô devient une ville morte. Il fait nuit et tout est fermé. En plus, il s'est mis à pleuvoir. Il ne me restait plus qu'à attendre en grelottant dans la gare, en repensant à toutes ces belles images dont je venais de faire le plein. Un weekend bien agréable, malgré tout.