samedi 25 février 2017

Au fil des saisons
Dans l'article daté du 11 décembre, je m'interrogeais sur ce à quoi allait ressembler l'hiver au Japon. J'ai maintenant pu expérimenter chacune des saisons sur ma terre d'accueil, et bien que je ne sache pas si l'année que je viens de traverser est représentative du climat local, et même si je ne suis pas d'habitude particulièrement porté sur les conversations traitant de la météo, j'aimerais vous parler un peu du temps qu'il fait, pour vous faire sentir surtout le temps qui passe...
Le printemps est la saison qui semble la plus "normale" quand on arrive de France. Les journées ensoleillées alternent à peu près équitablement avec les journées fraiches, il ne fait jamais trop chaud ou trop froid, il pleut parfois, les nuages ne sont jamais bien loin, mais quand le ciel s'éclaircit, on croirait que l'été est déjà en train d'arriver. C'est trompeur, il faut patienter encore un petit peu avant de tomber la veste, car il fait encore souvent frisquet. La saison est évidemment marquée par la floraison des cerisiers, les fameux sakuras, et cet épisode a beau être très court, il offre des images si belles que les sakuras symbolisent vraiment le renouveau printanier.
Dès le mois de mai, les journées se réchauffent sensiblement, et on sent bien que l'été pointe le bout de son nez, pour de bon cette fois-ci. De semaine en semaine, la chaleur, qui n'était jusqu'ici qu'occasionnelle, s'installe plus fréquemment et augmente jusqu'à devenir brûlante. On est trempé de sueur au moindre mouvement, on ne supporte plus ses vêtements, on suffoque rien qu'à inhaler l'air bouillant, et ce ne sont pas les pluies abondantes de juillet qui viennent rafraichir l'atmosphère. Le Japon est situé à peine plus bas que la France, le climat y est pourtant presque tropical.
L'été, on va à la plage tout seul ou avec les copains, c'est la saison des matsuris et des feux d'artifice, et pour tout dire, c'est de loin ma saison préférée. J'aime cette lourdeur moite, j'aime cette ambiance festive qui baigne tout le pays et qui vous fait croire que vous êtes en vacances, j'aime quand le Soleil vous attaque l'épiderme comme un incendie ravage une pinède, j'aime entendre les cigales chanter, j'aime voir les gens danser en kimono, j'aime les lanternes sur la rivière, j'aime mourir de chaud.
A peine les averses estivales cessent, c'est la saison des typhons qui commence en septembre. Du coup, le temps se radoucit progressivement, sans qu'on s'en aperçoive. Les belles journées sont encore tellement nombreuses qu'on n'a pas vu arriver l'automne. Une journée sans nuage vous chauffe la peau avec une ardeur qui étire les derniers restes de l'été jusqu'en octobre. On se résigne toutefois à enfiler un bonnet dès que les nuages apparaissent, plus moyen de s'en priver si on veut profiter du bon air frais et de la rougeur des érables, et plus rarement des paysages enneigés. La neige en novembre, à Tôkyô, ça faisait plus de quarante ans que ça n'était pas arrivé !
En décembre, on en encore du mal à croire à l'hiver, sauf quand le vent souffle. On ne voit plus un nuage, ou si peu, plus une goutte de pluie, si ce n'est tous les dix jours, quand le gris envahit l'atmosphère du matin au soir. Dès le lendemain, c'est reparti pour un cycle de dix jours sans qu'une ombre ne vienne salir le bleu du ciel profond. Et puis parfois, les températures retombent et soudainement, il se met à neiger abondamment. Deux jours après, tout a fondu.

A partir de janvier, le vent qui apportait le froid devient incessant. Un vent glacial qui souffle fort, nuit et jour, et pénètre sans pitié la fibre de vos vêtements. Certes, le ciel toujours aussi bleu brouille les pistes. Quand on est tellement habitué à la grisaille française, on a du mal à réaliser qu'on est au cœur de l'hiver. Un rayon de Soleil réchauffe l'âme, mais hélas pas le corps, rongée par ces terribles bourrasques, plus mordantes que du givre. L'air est très sec, la peau n'en souffre que davantage.
Cependant, je préfère mille fois cet hiver à celui de la France, où on passe généralement son temps à patauger dans la gadoue.

Et puis les rafales gelées s'apaisent. Après des semaines de souffrance, quand la fin de l'hiver s'approche, très rarement, le vent tourne, et au lieu de charrier des courants d'air froid, il souffle un peu d'air tiède. Ça ne dure jamais bien longtemps, mais ça suffit à redonner espoir : le printemps reviendra.
J'ai hâte.
Tout ça pour dire que ça va faire bientôt un an que j'habite au Japon, mais ça, je vous en reparlerai en temps voulu.

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