dimanche 3 janvier 2021

Kyôto 1 : la montagne des dieux

La seule fois où je m'étais rendu à Kyôto, c'était en septembre 2008, lors de mon premier voyage au Japon. J'y avais passé presque une semaine, et en avais gardé un merveilleux souvenir. Kyôto est une ancienne capitale, et est de ce fait très riche d'un point de vue culturel. Tellement riche que je n'avais bien sûr pas eu le temps de visiter tout ce que j'avais envie de voir. L'idée d'y retourner me trottait donc dans la tête depuis que j'ai fait du Japon ma terre d'adoption. Aussi ai-je profité des vacances d'hiver pour me couper un peu de l'intensité de ma vie professionnelle et aller me plonger à la fois dans mes souvenirs et dans le cœur d'un Japon totalement fascinant. Un petit voyage bien rempli, que je souhaiterais partager avec vous en plusieurs épisodes.


Quand je découvre une ville, j'aime commencer par prendre de la hauteur, littéralement, pour me faire une image globale des lieux avant d'aller en explorer les rues et les secrets. C'est ce que j'avais fait il y a douze ans, et c'est ce que j'ai refait dès mon arrivée à Kyôto. Ma première visite fut donc une sorte de pèlerinage à la Kyoto Tower. Certes, ce n'est ni la plus haute ni la plus belle tour du Japon, mais située au centre de la ville, juste en face de la gare, elle offre un panorama circulaire sur l'ensemble de l'agglomération et les montagnes qui l'encerclent.
Quelle émotion que de retrouver cette vue ! Comme sous l'effet d'une madeleine de Proust, les sensations de ma première visite me sont revenues. A l'époque, j'étais loin d'imaginer qu'un jour j'habiterais au Pays du Soleil Levant. J'aurais peut-être à peine osé en rêver. Quel chemin accompli, depuis, songeais-je en contemplant le soleil se coucher...

Je me suis ensuite rendu à la gare, que je n'avais autrefois visité que de jour. Visiter une gare, quelle drôle d'idée me direz-vous. Détrompez-vous, celle de Kyôto est un chef d'œuvre architectural, immense et époustouflant. Peu de changements dans la gare, si ce n'est la disparition d'une salle de cinéma au nom français ("Ciné libre" !), mais le plaisir de découvrir le bâtiment de nuit, qui plus est agrémenté des illuminations de Noël. Tout simplement magique.




Le lendemain, j'ai pris le bus pour me rendre au Fushimi Inari-Taisha, un sanctuaire dont les images sont mondialement célèbres, et dont la visite était restée en suspens sur ma liste des choses à faire, faute de temps.

Quiconque s'intéresse un tant soit peu au Japon a déjà vu les photos de ce chemin balisé de dizaines de torii, ces portiques vermillons qui marquent l'entrée du territoire des dieux. Ce que je ne savais pas, c'est que ce chemin fait tout le tour de la montagne sur un trajet d'environ quatre kilomètres, et que ce ne sont pas des dizaines mais des milliers de torii qui jalonnent le sentier ! Ce n'est pas qu'un simple sanctuaire qui est consacré (au sens religieux), mais toute la montagne ! Dès lors, arpenter le chemin ne peut pas être considéré comme une simple promenade, mais prend la dimension d'un acte spirituel, presque une prière. La route est suffisamment éprouvante pour que l'effort fourni tienne lieu de pénitence, mais malgré tout accessible à tous pour que son ascension reste un plaisir. D'innombrables représentations du dieu Inari, sous sa forme de renard la plupart du temps, veillent sur le pénitent d'un regard à la fois sévère et protecteur. Après avoir contourné toute la montagne, on revient à son point de départ avec le sentiment d'avoir vécu une expérience mystique.







Cette excursion ayant pris plus de temps que ce que j'avais planifié, j'ai 
tranquillement terminé ma journée par une promenade nocturne dans le quartier de Gion. C'est ici que se concentrent la majorité des okiya, les maisons de geishas. Tant que j'y suis, si certains s'imaginent encore que les geishas sont des sortes de prostituées, je vous renvoie à ces deux excellentes vidéos qui, j'espère, mettront définitivement fin à cette croyance tenace. J'avais déjà arpenté ce vieux quartier de jour, et étais tombé sous le charme de ses maisons traditionnelles en bois et de ses rues étroites. De nuit, le charme opère tout autant, et se double d'une aura mystérieuse. Que cachent ces élégantes façades aux rares fenêtres voilées ? Certains établissements s'affichent clairement (quoique discrètement, ce qui me fait penser que les clients doivent surtout être des habitués) comme des restaurants, mais pour les autres ?... S'agit-il d'okiya, de maisons de particuliers, ou de lieux secrets auxquels seuls quelques initiés ont accès ? Voilà de quoi stimuler l'imaginaire. Cette fois, j'ai renoncé à prendre des photos, aucune de ce que mon matériel - et mon talent - m'aurait permis de prendre n'aurait en effet su retranscrire la magie qui s'est emparé de moi au cours de cette déambulation.

J'ai repris mes forces en savourant les délicieuses spécialités locales. La cuisine de Kyôto est extrêmement raffinée, toujours surprenante, et particulièrement saine. J'étais prêt à attaquer la journée du lendemain.
A suivre...






5 commentaires:

  1. Incroyable ce chemin de Torii, on dirait parfois un tunnel traversant la forêt. Cela me fait aussi penser à du Land Art...Quelles sont les inscriptions dans la partie 3?

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    1. On peut "acheter" un torii pour soutenir le sanctuaire. Les noms inscrits sur les piliers sont ceux des particuliers et des entreprises qui en sont "propriétaires". J'ai même vu un couple de particuliers qui venaient faire le ménage de "leur" torii !

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    2. Ah oui?! On pensait plutôt que c'était des phrases de méditation! :)

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  2. merci Ludo pour ces ballades enchanteresques...la marche en montagne c'est exaltant .surtout en temps de covid!!! le dome couper dans le jardin sec, a quelle signification? des bises

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    1. Merci pour ton commentaire, Steph. Le dôme coupé dans le jardin du Pavillon d'argent (voir article "Kyôto 3") est une représentation stylisée du mont Fuji.

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